À Reims, dans la lumière d’une journée claire, la Maison Barfontarc a proposé une dégustation verticale de sa cuvée La Vigne au Roy. Une expérience rare, intime et précise, qui a permis de lire l’évolution du style de la Maison au fil des millésimes, et de comprendre la profondeur d’un terroir où le pinot noir trouve une expression singulière.
Fondée en 1962, Barfontarc réunit aujourd’hui une cinquantaine de familles de vignerons installées dans les villages de Baroville, Arconville, Arsonval, Dolancourt, Fontaine, Montier-en-l’Isle, Rouvres-les-Vignes et Trannes. Un collectif soudé autour d’une idée simple : travailler la vigne avec rigueur, transmettre sans emphase, et laisser le vin exprimer ce que la Côte des Bar porte en profondeur. Ce socle géologique, souvent évoqué mais rarement réellement goûté dans sa dimension de temps long, a constitué le fil conducteur de cette verticale.















Les cuvées dégustées ont mis en lumière la continuité de la qualité de Barfontarc et la personnalité de chaque année :
La verticale a débuté avec La Vigne au Roy Nature 2016, issue essentiellement de têtes de cuvée, vinifiée sans dosage. Le vin se présentait lumineux, avec des notes de fleur d’acacia, de pêche blanche, puis un glissement vers la pâte d’amande et la noisette fraîche. La bouche, dense mais droite, s’achevait sur une minéralité nette, presque saline. Une expression idéale pour accompagner huîtres et crustacés, sashimi, poissons crus ou préparations iodées délicates.
Dans un registre différent, La Vigne au Roy 2016 Brut dévoilait la même base aromatique, mais portée par un registre plus ample. Le fruit sec dominait, accompagné d’une touche de gingembre confit. La bouche gagnait en ampleur, ronde sans lourdeur. Il trouvait une résonance naturelle avec un homard ou une langoustine à la nage ou grillées, ou encore un magret à l’abricot, ou un tournedos Rossini. un plat où la douceur de la chair répond à sa souplesse.
Le millésime 2014 (zéro dosage) s’exprimait avec une grande clarté. Des nuances de fruits jaunes, un souffle brioché, puis une énergie droite, soutenue par une minéralité fine. La finale se tendait légèrement, élégamment. Il appelait des viandes blanches au jus vif, ou même un magret aux fruits où l’acidité répond à la chair.
La Vigne au Roy 2013 montrait une finesse singulière : pomme verte, amande douce, fleurs séchées. La bouche se déployait longuement, élancée, presque retenue, mais parfaitement construite. Il révélait toute sa nuance avec un fromage de la région, un Langres affiné ou une poire pochée, selon que l’on cherche le contraste ou l’accord miroir.
La Vigne au Roy 2012, issu de têtes de cuvée, offrait davantage de gourmandise. Des arômes de poire pochée et de noisette fraîche, une matière crémeuse, portée par une vivacité encore vive. Ce 2012, enfant d’une année tourmentée, compliquée, qui a pourtant donné de très beaux raisins, s’est affirmé à table avec des Saint-Jacques poêlées, où la douceur du fruit de mer rencontrait sa salinité fine.
Le millésime 2008, reconnu partout comme exceptionnel, se présentait avec une pureté incisive : fleurs blanches, agrumes, craie, une bouche longue, structurée. Il appelle naturellement turbot, sole ou poissons à la vapeur accompagnés de sauces claires.
2002 offrait une ampleur intérieure. Un vin large mais calme, où la maturité ne se dit jamais en puissance mais en tenue. Une longueur posée, presque confidentielle.
La Vigne au Roy 2000, enfin, montrait une maturité aboutie : notes de fruits secs, miel, pain toasté. Une bouche pleine, arrondie, où l’évolution n’efface jamais la structure. Il trouve une résonance remarquable avec desserts aux fruits, notamment une fraise ou une pêche en tarte fine.
(NDLR) Dans cette séquence, 2002 s’est imposé comme un moment de pure émotion. 2014, quant à lui, a touché par sa finesse et sa grâce.
Ce que révèle cette verticale
Cette verticale a montré que Barfontarc ne cherche ni l’effet ni la démonstration. La Maison avance avec une fidélité constante à son territoire et à son identité, convaincue que la vérité du vin se construit dans la patience. Les millésimes dégustés, chacun avec leur rythme et leur lumière propre, ont révélé un style sincère, stable, attentif aux nuances plutôt qu’aux contrastes forcés. À travers ce voyage dans le temps, Barfontarc s’affirme comme une Maison discrète, mais sûre d’elle, dont les vins ne s’expliquent pas (ou presque), ils se découvrent.



Des voix pour raconter le vin
Au fil de la dégustation, la présence de l’équipe Barfontarc a donné à l’expérience une dimension presque intime. Denis Tardieu, chef de caves, en fut le fil conducteur. Sa parole se déployait avec sobriété, sans emphase, mais avec une précision qui témoignait d’années d’observation attentive. Il ne décrivait pas seulement des arômes ou des structures. Il parlait du temps, de la manière dont chaque millésime se dépose lentement dans le vin, s’affine, se nuance, trouve sa ligne sans jamais s’alourdir ,sous le regard de Johanna Afoufa, Cuviste dans la Maison depuis 2024. À ses côtés, Olivier Martin, directeur de la Maison, portait le récit collectif. Il rappelait que Barfontarc n’est pas l’expression d’une volonté individuelle, mais le fruit de vignerons unis par une même exigence, celle de laisser le terroir guider plutôt que de chercher à le faire entrer dans un cadre prédéfini. Nicolas Vallée, responsable commercial et marketing, offrait quant à lui une lecture plus large, ancrée dans la place de Barfontarc au sein de la Côte des Bar. Il évoquait avec Nicolas, une Maison solide, structurée, qui avance avec constance, loin du bruit, loin du spectaculaire convenu.
Au Piano des Chefs : un cadre qui écoute
La dégustation s’est tenue à l’Atelier Au Piano des Chefs, à deux pas de la cathédrale de Reims. Un lieu dédié à la transmission, où le chef Eric Geoffroy (avec la présence exceptionnelle de Thierry Sidan) propose une cuisine attentive, en cohérence avec les vins. La lumière, le rythme calme, la proximité de la cuisine (l’atelier et les fourneaux sont ouverts) créaient les conditions d’une écoute fine, d’un moment de partage.
L’abus d’alcool est dangereux pour la santé – A consommer avec modération.
Plus d’informations
Champagne de Barfontarc
Au Piano des Chefs (Reims)






















